Stratégie marketing éthique : en voilà un triptyque de mots qui, à première vue, paraissent bien antinomiques !
Eh bien non, pas du tout ! De nos jours, si la notion de marchandisage semble opposée à celle d’éthique, c’est surtout parce que l’image de la mercatique a été quelque peu ternie durant ces dernières décennies. Face aux publicités agressives et à l’usage de moyens pas toujours déontologiques, le consommateur est devenu méfiant et se pose désormais nombre de questions en lien direct avec ses valeurs. Depuis l’arrivée de nouveaux enjeux de société, tels que la transition écologique et le développement durable, son comportement d’achat évolue. Pour autant, le marketing éthique n’est pas une vérité absolue. C’est une réponse économique de l’entreprise à la demande croissante d’authenticité. Également appelé marketing responsable, il se distingue du conventionnel dans le sens où il intègre des critères moraux au cœur même de ses techniques.
Quels critères ? Comment sont-ils associés à la mercatique ? À quelle demande répondent-ils ? Pourquoi ? Autant de questions qui conduisent à s’intéresser de près à ce qu’est réellement une stratégie de marketing éthique. On verra qu’elle s’articule autour des 3 sens du terme « convertir » : croire et rallier, transformer, gagner en valeur. Suivez le guide !
L’engagement de l’entreprise, préambule de toute stratégie de marketing éthique
Le marketing éthique n’est pas une science exacte, car il s’appuie sur la notion de valeurs. Toute démarche mercatique bioéthique n’est efficace que si l’engagement de l’entreprise en est la source. Il faut croire pour rallier.
Au commencement sont les valeurs
En philosophie et dans la religion, ce concept se définit par « ce qui rend une personne digne d’estime ». Autant dire qu’en termes d’exactitude, on est loin du compte ! En sociologie, elle se précise : « perceptions qu’un individu partage avec les membres de son groupe socioculturel ». Actuellement, ces préoccupations tournent autour des questions sociales, sociétales, humanistes, d’environnement, de santé, de bien-être, etc.
Dans le commerce, l’implication de l’entreprise dans l’entretien et le partage de ces valeurs est nécessaire à la bonne adhésion du client. L’établissement commercial ne doit donc plus seulement positionner son offre, il doit véhiculer son engagement. Dans cette optique, il lui est essentiel de prendre soin de sa politique RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) qui comporte 7 questions primordiales :
- la gouvernance de l’organisation ;
- les Droits de l’Homme ;
- les relations et conditions au travail ;
- l’environnement ;
- la loyauté des pratiques ;
- la considération du consommateur et des communautés ;
- le développement local.
Plus le plan d’action RSE est cohérent avec la stratégie de marketing globale, plus l’entreprise rallie son écosystème à sa démarche écoresponsable.
Honorer le développement durable
Quelle est l’idée centrale du développement durable (DD) ? Elle est délicate : toute société humaine doit vivre en répondant à ses besoins, sans compromettre pour autant la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Le DD englobe donc les 3 piliers que sont l’économie, l’environnement et le social. Il pose un cadre en matière de :
- pérennité de la planète (durable et soutenable) ;
- gestion des ressources naturelles (viable) ;
- cadre de vie acceptable (vivable) ;
- respect des Droits de l’Homme (équitable).
En ce sens, il est prééminent aux autres valeurs écologiques et sociétales. Agir pour le développement durable est porteur d’avenir en général.
Le « consom’acteur » tu ne tromperas point
Plus averti, de manière instantanée grâce au Web, le consommateur d’aujourd’hui réinvestit son comportement d’achat. Il aspire à ce que chacune de ses transactions traduise sa volonté d’exister dans la société :
- il en est un des acteurs principaux ;
- il distribue de la richesse ;
- il est solidaire d’une communauté ;
- il œuvre en faveur de l’environnement ;
- il rejette l’hyperconsommation.
Il devient, par conséquent, un « consom’acteur », cible star du marketing digital, choyé par le rédacteur copywriter et le storyteller. L’approcher en toute transparence est le seul moyen de le convertir. Mais comment concrètement ?
Convertir en rendant le marketing mix plus durable
Même si le champ du mix s’est récemment élargi (7P, 10P…), une stratégie durable s’intéresse principalement aux 4P : Product, Price, Promotion, Place (Produit, Prix, Distribution, Communication).
Intégrer de l’authenticité dans le produit
Comment reconnaître un produit véritablement imprégné d’écoresponsabilité ? 3 mentions valent de l’or pour l’acheteur engagé :
- L’Écolabel européen, qui indique la présence de matières écologiques ;
- L’indicateur de provenance, le célèbre « Made In », qui rassure sur l’optimisation du transport ;
- L’estampillation « FairTrade », qui garantit que le produit est issu du commerce équitable.
Redonner sa vraie valeur d’échange au prix
Rallier le client à une politique commerciale intègre passe aussi par la nécessité de transparence en matière de prix : Quels intervenants, quelle valeur ajoutée rémunère-t-il ? Un prix équitable est un prix clairement détaillé. Il recouvre non seulement les coûts de production, mais aussi les éventuels surcoûts liés aux conditions dignes de travail, ou à l’usage de matières premières biologiques. Au niveau de l’entreprise, il peut être compensé par un système de distribution plus direct. À l’échelle de l’acheteur, une consommation moins compulsive vient le contrebalancer.
Distribuer autrement
La prise de conscience de ces nouveaux enjeux de société demande à l’entreprise de se positionner en révisant parfois son système de distribution. Elle y intègre alors l’économie circulaire et collaborative dans des modèles de vente directe, ou de circuit de commerce équitable. Nous verrons, dans les exemples, que le mode de distribution est un atout majeur de la relation de confiance entre producteur et consommateur. Le fournisseur peut y gagner de précieux points en matière de transport, de revenus, de communication, de concurrence.
Communiquer : attention au greenwashing
Quoi de plus simple que de communiquer sur la qualité ? Quand la démarche RSE est inscrite dans son ADN, l’entreprise n’a aucun mal à valoriser sa marque. D’autant plus qu’elle s’offre ainsi un avantage concurrentiel indéniable. Toutefois, attention ! L’intérêt grandissant du public pour le respect de la nature conduit parfois certaines firmes à se fourvoyer dans une politique de communication trompeuse : le greenwashing. C’est-à-dire qu’elles se servent de l’argument écologique uniquement pour redorer, ou pire, blanchir leur image.
Opérer une véritable stratégie de marketing éthique ne revient pas seulement à laver le cerveau du prospect à la lessive écologique ! L’ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) y veille et l’ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) a édité un guide anti greenwashing.
Convertir pour gagner de la valeur : 3 exemples de marketing responsable qui marchent
Dans une volonté de se refonder plus authentiquement, l’entreprise peut passer par la mise en place de nouveaux business models.
1. L’écoconception : « Dans la pérennité tu t’inscriras »
L’écoconception consiste à fabriquer un produit ayant peu d’impact sur l’environnement tout au long de sa durée de vie. Pour cela, son cycle de vie est analysé et optimisé selon le cahier des charges établi par l’Écolabel :
- durant sa conception (choix des matériaux) ;
- au cours de sa fabrication (choix des processus, des emballages) ;
- lors de sa distribution (transport) ;
- pendant sa consommation (mode d’utilisation) ;
- après sa consommation (recyclage, récupération…).
C’est l’exemple de la gourde réutilisable, des appareils électroménagers étiquetés « A, B, C… », des détergents et cosmétiques labellisés, etc.
2. Le direct-to-consumer : « Plus crédible tu deviendras »
Dans ce cas de figure, le fabricant assure lui-même, en direct, la distribution de ses produits. Cela lui permet :
- de réduire tout transport inutile (gain écologique) ;
- de mieux connaître sa cible ;
- d’améliorer ses marges ;
- de rendre son produit et sa communication plus crédibles.
Largement adoptée de nos jours, la vente directe crée une relation de confiance entre le consommateur et le producteur. On en retrouve de parfaites démonstrations sur les marchés, mais également dans la vente à domicile, les ateliers de créateurs ou les boutiques à la ferme.
3. L’économie de fonctionnalité : « Ta valeur ajoutée sera ton Graal »
L’économie de fonctionnalité est une solution globale innovante qui ne base plus la notion de vente sur le simple transfert de propriété, mais sur la jouissance de l’usage du bien. Un exemple clair ? Au lieu de vendre une machine à laver, un fournisseur peut proposer un service de lavage. Ce dernier comprend la mise à disposition du lave-linge, la fourniture de lessives, l’entretien de l’appareil, la prise en charge des coûts de consommation d’eau et d’électricité, etc.
Cette solution concilie intérêt écologique et économique en luttant contre l’obsolescence programmée, en s’adaptant aux réels besoins du consommateur, face à l’envolée des prix de l’énergie.
Pour le fournisseur, les avantages sont de :
- mieux lisser ses revenus ;
- se différencier des concurrents ;
- fidéliser ses clients.
L’intérêt pour le développement durable est une réalité qui va se renforcer, car elle concerne de plus en plus de « consom’acteurs ». Les convertir, les challenger, développer leur demande pour une offre plus responsable répondant aux enjeux de société, tels sont les objectifs principaux d’une bonne stratégie de marketing éthique. Elle peut être aisément perçue comme une opportunité d’innovation et de différenciation, car elle restaure la confiance avec sa cible. Elle met en avant des produits de qualité équivalente, voire supérieure aux traditionnels et renouvelle ainsi l’image de l’entreprise. Le marketing responsable est un marketing proactif. Il crée de la valeur pour la marque et l’ensemble des parties prenantes : un véritable marketing d’avenir !
écrit par Élodie Branchy